En 2018, la danse avait la cote à la télévision, et TVA entrait en piste avec un concept original québécois appelé Révolution, lequel a tout de suite touché une corde sensible chez le public.
Six ans plus tard, non seulement la compétition imaginée par la maison Fair-Play et Québecor Contenu rallie toujours à hauteur de plus d’un million ses téléspectateurs québécois les dimanches d’automne, mais la formule Révolution a également débordé des écrans et constitue désormais une franchise en soi, déclinée en moult supports créatifs.
Une sixième saison all stars (« tout étoile », rassemblant les meilleurs danseurs des chapitres précédents) est en préparation pour la rentrée de septembre au petit écran. Une série fictive, intitulée Danse!, écrite par Sarah-Maude Beauchesne, à l’intrigue campée dans un concours à la Révolution, avec notamment Bianca Gervais, Maxime Le Flaguais et la nouvelle maître de l’émission, Mel Charlot, doit aboutir incessamment sur Club illico. Un EP de trois pièces à saveur urbaine, titré Révolution en tournée, les inédits, rassemblant les voix d’Imposs (Face à face et Lumière en duo avec Tina Leon) et de Camille Poliquin (Lost Inside a Dream), sur des musiques de Manu Alias, vient en outre d’être déposé sur les plateformes numériques.
Généreux et enlevant
Et, bien sûr, il y a le spectacle, Révolution en tournée, dont la quatrième mouture bat présentement son plein dans la Vieille-Capitale, au Théâtre Capitole, avant d’aller enflammer les troupes de Sherbrooke et Trois-Rivières à la fin avril et en mai. En mars, c’étaient Montréal et Gatineau qui succombaient au plaisir contagieux de la stepette fraîche, vive et vitaminée de Révolution en tournée.
Les adeptes de Révolution à la télé pourraient se sentir davantage interpellés par cette proposition en salle, la mise en scène de Révolution en tournée (œuvre de Lydia Bouchard, juge associée à la production depuis ses débuts) prétendant recréer le parcours des candidats sous les caméras. On transpose les différentes étapes du concours, des coulisses à la lumière. Cette toile de fond s’avère néanmoins bien subtile, presque imperceptible par moments. Le fait de connaître les athlètes et personnalités en mouvement (ici, notamment, les Yoherlandy, Jordan & Santiago, Katherine Leblanc et autres Gabrielle Boudreau consacrés vedettes par Révolution – ils et elles sont une douzaine de danseurs, duos ou troupes à se dandiner sans répit sous nos yeux), d’avoir admiré leurs numéros signatures à l’écran, ajoute aussi possiblement au plaisir des retrouvailles, d’autant plus que des extraits diffusés à TVA sont régulièrement projetés pendant la représentation.
Mais ce ne sont là que prétextes et fioritures; Révolution en tournée existe fort bien indépendamment de sa maison-mère télévisée, avec ses performances puissantes et galvanisantes. Ces prestations scéniques Révolution sont, depuis leur mise au monde en 2020, toujours divertissantes, mais ce quatrième et nouveau cru se révèle particulièrement généreux et enlevant. Son espace souvent occupé dans tous ses recoins et sans temps morts, ses costumes, sa plateforme circulaire, ses impressionnantes pirouettes, ses effets d’éclairage et de pyrotechnie légère : on en donne au spectateur, on l’incite à se remuer lui aussi les esprits, on lui laisse très peu de temps pour souffler ou cogiter entre deux prouesses.
Le résultat est de surcroît un peu plus cohérent que l’édition de l’an dernier avec ses nombreux tableaux collectifs et sa forte prédominance hip-hop, danse de rue et contemporaine. Rayon mélodies, on gambade d’Aimer d’amour à Another One Bites The Dust, Welcome to the Jungle à Piece of my Heart, Kanye West côtoie Charles Aznavour et Marilyn Manson. Tous les goûts y prendront leur pied (lequel ne pourra s’empêcher de gigoter).
Des parenthèses plus intenses nous transportent également dans d’autres sphères émotives, comme le duel de Jason Morel Canavaggia et Marie-Josée Corriveau sur My Girl, évoquant violence et sensualité, voire sexualité, et cette charge contre la misogynie (vue à la télé) figurée sur Juste une femme par Gabrielle Boudreau, gagnante de la cinquième saison de Révolution, à l’automne 2023.
« Eh bien, redansez maintenant! », avons-nous envie de scander à cette belle bande d’artistes, as de la contorsion. Car la bannière Révolution aura accompli ceci de joli : nous donner un tantinet l’envie de la fête, de l’expression des corps, de la valse au breakdance. Dans les écoles de danse de la province, parlera-t-on un jour d’une « génération Révolution », poussée à cet art par une certaine émission du dimanche propulsée en 2018? Peut-être.
Pour connaître toutes les dates de la série de spectacles Révolution en tournée, on consulte le site web officiel.
Ou encore celle, tout aussi enthousiaste, d’En marge du texte, de David Goudreault.
Crédit photo principale : Courtoisie Gestev