Dépassés, démodés, déphasés, les galas? Pas si vite. Leur popularité chancelle un peu partout dans le monde, certes, mais il serait précipité d’affirmer que leur déclin final est amorcé.
Après tout, les récents Golden Globes ont abondamment alimenté les discussions sur les réseaux sociaux, on sent une frénésie à l’approche des Emmy Awards du 15 janvier, on spécule déjà en vue des prochains Oscars, et on n’a pas encore enterré non plus les Grammy et les Juno.
Au Québec, le Gala Artis est décédé et on a eu peur pour le Gala Québec Cinéma, d’abord abandonné par Radio-Canada en 2022, mais celui-ci fut finalement récupéré avec brio chez Noovo avant les Fêtes. On en a profité pour rebaptiser le prix du public au nom de Prix Michel-Côté, pour honorer la mémoire du regretté acteur chouchou du box-office, décédé en mai 2023.
Et si les plus récents Gémeaux – excellents, pilotés par un Pierre-Yves Lord en grande forme – se sont, pour une énième fois, soldés par une controverse, son organisatrice, l’Académie canadienne du cinéma et de la télévision, annonçait la semaine dernière quelques changements pour convaincre les récalcitrants de revenir à la fête : un rabais de 15% sur le tarif d’inscription d’ici le 2 février, le retour des catégories féminines et masculines en interprétation pour les fictions (on abandonne ainsi les catégories non genrées qui avaient fait grincer des dents l’industrie l’an dernier) ainsi qu’une révision de la pondération dans l’attribution des votes finaux par le jury (et une diminution du pourcentage alloué aux cotes d’écoute). Le départ de Louis-José Houde du Gala de l’ADISQ après ses 18 ans aux commandes donnera par ailleurs peut-être un second souffle à la grand-messe de la musique québécoise en 2024.
Nonobstant ce lustre qui demeure, il reste que les galas demeurent coûteux à produire, que leur audience n’est plus impressionnante comme elle l’a déjà été et qu’il s’en trouvera pour douter de leur pertinence, à l’heure où les publics se fragmentent au même rythme que les plateformes se multiplient, et ce, autant en télévision qu’en musique et en humour.
Si les galas devaient disparaître, des solutions de rechange existeraient néanmoins. Est-ce qu’une émission comme En direct de l’univers, qui fait chaque semaine la part belle à l’émotion et qui nous offre fréquemment des numéros de variétés d’envergure, pourrait se substituer aux traditionnelles remises de statuettes? Entre invités surprises et chansons coups de cœur, une édition spéciale d’En direct… pourrait-elle insérer paillettes, trophées et discours pour célébrer un art ou un autre?
France Beaudoin, grande magicienne du rendez-vous du samedi soir, soutient ne jamais avoir véritablement réfléchi à cette possibilité.
« On est conscients qu’En direct de l’univers est un véhicule qui peut servir à différentes affaires. Est-ce qu’un jour on pourrait faire un gala là-dedans? Je ne sais pas… », avance-t-elle en entrevue.
L’idée ne semble pas enflammer particulièrement l’animatrice et productrice. Il y aurait risque d’user la formule, songe-t-elle à voix haute, déjà que celle-ci souligne superbement, chaque année, le Jour de l’An et la Journée internationale de la Francophonie. Puis, s’il y a abolition de galas, « ça couperait des jobs et des postes à d’autres ». Pour l’heure, France maintient ne « jamais, jamais » avoir reçu de demande de Radio-Canada en ce sens. « Il n’a jamais été question de ça. »
Et elle-même, France Beaudoin, serait-elle intéressée à tenir les rênes d’un gala télévisé, quel qu’il soit? Elle possède certainement l’étoffe et la prestance pour le faire. On lui a déjà proposé d’en animer un, une fois, révèle-t-elle à Sous les projecteurs.
« Mais je n’avais pas voulu. Je trouve que c’est un art, animer un gala. Il y a du monde qui sont faits pour animer des galas, et moi, non. Ce n’est pas mon timing, je n’avais pas souhaité le faire. »
La femme d’affaires et sa maison de production Pamplemousse Média ont de surcroît amplement de quoi se divertir. Des événements d’envergure, son équipe en mitonne, avec la Soirée Mammouth et la Revue culturelle menée par André Robitaille à chaque fin d’année. Puis, il y a En direct de l’univers (France fantasme encore de recevoir plusieurs artistes, notamment Xavier Dolan), On va se le dire, Pour emporter (qui soulignait sa 100e rencontre en octobre dernier), Silence, on joue!, Je viens vers toi, Retour vers la culture, On ramassera demain, Les stagiaires…
Et, maintenant, Dans un cinéma près de chez vous, qu’animera Karine Vanasse pour la première fois ce dimanche, 14 janvier. Dans une réalisation de Frédéric Nassif se rapprochant du documentaire, la comédienne nous fera découvrir les longs métrages québécois qui prendront l’affiche dans les prochains mois, en s’entretenant avec producteurs, cinéastes, scénaristes et même cinéphiles. On aura ainsi des aperçus de 1995, de Ricardo Trogi, Tu ne sauras jamais, de Robin Aubert, Dans une galaxie près de chez vous III, de Claude Legault et Pierre-Yves Bernard, Deux femmes en or, de Chloé Robichaud et Catherine Léger, et Lucy Grizzli Sophie, adaptation cinématographique de la pièce La meute, de Catherine-Anne Toupin, mise en images par Anne Émond, et plusieurs autres projets.
Et n’oublions pas que 2024 sera également l’année de la sortie de Nos Belles-Sœurs, alors que les mythiques personnages de Michel Tremblay feront pour la première fois le saut au grand écran dans la comédie musicale déjà connue sur scène, orchestrée par René Richard Cyr, d’après les chansons de Daniel Bélanger.
« On s’est donné le mandat d’aller dans les coulisses, se promener sur les plateaux, aller voir ce qui est en train de se tourner, pour donner le goût à notre cinéma. Pour avoir l’impression d’être en chemin, d’avoir un bout de fait, dans notre tête, vers ces films-là. L’idée n’est pas d’en parler après coup, mais avant et pendant, pour que les gens puissent être au courant », signale France Beaudoin au sujet de Dans un cinéma près de chez vous.
Dans un cinéma près de chez vous, ce dimanche, 14 janvier, à 20 h, à ICI Télé et sur ICI Tou.tv. 90 minutes. Jusqu’au 31 janvier, ICI Tou.tv Extra présente aussi une sélection d’une soixantaine de films québécois.
Crédit photo principale de France Beaudoin : Courtoisie Radio-Canada
Marie-Josée R.Roy
Fondatrice / Rédactrice en chef / Journaliste