Dehors, mercredi soir dernier, 15 novembre, tout le Québec pleurait le départ de Karl Tremblay des Cowboys Fringants. Mais au Club Soda, un Mike Beaudoin roulant sa bosse comme humoriste depuis 18 ans, et qui remplit les salles avec un premier spectacle autoproduit, Vrai, depuis un an et demi, vivait la frénésie d’une première montréalaise qu’il a longtemps espérée.
Son fidèle public partageait son enthousiasme et s’est abondamment esclaffé à ses récits très personnels. À commencer par le résumé de son parcours à vitesse grand V, de sa jobine de vendeur de traitements de pelouses jusqu’à son succès actuel, en passant par sa paternité hâtive (d’une fille d’aujourd’hui 13 ans et d’un garçon de 3 ans, nés de deux « madames » différentes) et ses premières parties des Fleurs du tapis, de Rachid Badouri.
Mike surfe ainsi sur sa réalité de jeune papa, le bonheur (!) de la vasectomie, ses passions parfois juvéniles (pensez bébés fonçant dans des portes-patios sur Instagram…), un incident de santé en randonnée, les imprévus automobiles, le décalage de désir sexuel dans son couple, l’envie ou pas de se marier…
Des tranches de vie ni particulièrement enlevantes, ni très originales, mais dans lesquelles plusieurs se sont apparemment reconnus, les réactions enthousiastes le prouvant. Mike Beaudoin ne jouit pas d’une surexposition médiatique, il demeure encore relativement inconnu aux yeux de monsieur et madame tout-le-monde, mais son expérience en festivals et dans les bars, ses interventions estivales à CKOI l’an dernier et sa popularité sur les réseaux sociaux – 99,2 K abonnés sur TikTok – lui confèrent une indéniable complicité avec ses fidèles, mesurable au parterre.
La séquence de la mort de son père, superposée à la naissance de son fiston en 2020, gagnerait à être approfondie, voire allongée, pour porter encore plus d’émotion, le filon des adieux sur le lit de mort s’avérant pourtant riche. Le numéro est efficace, mais pourrait être davantage marquant.
Respire, Mike!
Le garçon s’exprime à une vitesse parfois déstabilisante – respire, Mike! –, s’adresse à nous dans un langage adolescent (entrecoupé de trop nombreux « Man »…), tripe sur ses propres blagues de pénis (celui de son gamin de 3 ans…) et on aura possiblement oublié le contenu de Vrai après quelques jours, voire quelques heures, si on n’est pas de son lot d’admirateurs conquis. Mike Beaudoin, c’est le gars d’à côté, le bon chum avec qui on prendrait une bière pour l’écouter débiter ses anecdotes cocasses dans une soirée, celui qui séduit probablement par sa simplicité et sa gentille arrogance.
On n’aura pas besoin de lui donner de leçons d’amour-propre; cette assurance le sert bien au micro, sa redoutable présence sur scène accomplissant une grande partie du travail. Sa manière baveuse d’interagir avec les spectateurs fait d’ailleurs mouche à chaque fois.
Ce one man show constitue la parfaite carte de visite pour savoir qui donc est ce Mike Beaudoin et ce qu’il mange en hiver. Si les humoristes qui puisent leur matière première dans leurs malentendus avec leur blonde vous interpellent, Mike est votre homme.
À noter que le sympathique Erich Preach, le plus sollicité des comiques de la relève, donnant également dans un ton plutôt facile, ne réinvente rien non plus en première partie (au menu : constats de vieillissement et prix des maisons, en substance). Lui aussi a néanmoins été accueilli en vedette.
Mike Beaudoin présente Vrai en tournée un peu partout au Québec. Toutes les dates sont sur son site web.
Un autre humoriste bien connu effectuait aussi la semaine dernière sa rentrée montréalaise, avec beaucoup de succès. Lisez notre critique ici.
Marie-Josée R.Roy
Fondatrice / Rédactrice en chef / Journaliste