Le film Armageddon mettait peut-être en vedette, en 1998, des pointures de la trempe de Bruce Willis, Ben Affleck et Liv Tyler, c’est quand même de sa chanson thème, l’immortelle power ballad I Don’t Want to Miss a Thing, d’Aerosmith, qu’on se souvient le plus aujourd’hui.
C’est en s’épanchant dans des fresques musicales à la Gentlemen Prefer Blondes et Some Like It Hot que Marilyn Monroe est devenue le plus important sex-symbol du 20e siècle, même si les photos suggestives de l’icône blonde ont, avec le temps, remplacé ses trémolos dans l’imaginaire collectif. Idem pour Elvis Presley, indissociable de Viva Las Vegas, malgré d’autres essais moins fructueux au grand écran. Et des bijoux pop du genre de Toxic, de Britney Spears, ou Bad Romance, de Lady Gaga, se sont aussi faufilés dans la relecture récente de Moulin Rouge! sur Broadway, plus de 20 ans après le succès de l’opus de Baz Luhrmann en salle.
Des rappels évocateurs du genre, Gregory Charles en a plein sa besace pour expliquer avec son habituel enthousiasme le concept de son nouveau spectacle, 7 – De Broadway à Hollywood, qu’il décrit comme une célébration des plus grands films musicaux des 100 dernières années. « Fou de cinéma » et « malade d’histoire », se décrit-il lui-même, il était tout naturel que l’artiste marie un jour ses deux passions dans une production de toute l’envergure dont on le sait capable.
En hommage, peut-être, à ses parents, aujourd’hui décédés, eux aussi jadis férus de comédies musicales, qui étaient allés regarder trois fois La mélodie du bonheur à l’époque de leurs premières fréquentations… et qui n’étaient pourtant jamais parvenus à voir la fin de l’histoire. « J’imagine ce qu’ils faisaient », badine le fier fils en ricanant.
Évolution culturelle
Sur la scène de la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, dans quelques jours (du 15 au 19 novembre précisément), puis à Québec en juin prochain, l’homme-orchestre et son piano seront entourés de six jeunes chanteurs-danseurs (dont le talent déménage, on peut vous l’assurer après les avoir vus à l’œuvre), de danseurs, de musiciens et d’une centaine de choristes pour faire revivre les grands airs du septième art, tirés d’un bassin d’environ 250 films des 100 dernières années. Une quarantaine de pièces par représentation, au choix du public (qui votera par le biais d’un questionnaire via son téléphone intelligent), jamais les mêmes d’un soir à l’autre. West Side Story, Le Fantôme de l’Opéra, Les Parapluies de Cherbourg, Moulin Rouge!, Chicago, Cabaret, Elvis… Une simple énumération rapide de titres mythiques annonce déjà un buffet bien garni.
« Sur le plan académique, intellectuel, la rencontre d’un scénario, de voix exceptionnelles, d’un orchestre… C’est un moment d’évolution de la culture qui est énorme », signale Gregory Charles, qui perçoit dans le cinéma musical de toutes périodes une trame de fond aux transformations sociétales encore en cours aujourd’hui.
« La situation de la Femme et des personnes de race noire, des Juifs, l’inclusion sociale, la santé mentale, la maladie, l’orientation sexuelle… Les films musicaux traitent tous de sujets importants et super sérieux, avec une petite touche déjantée et une stepette! C’est comme si on avait décidé de prendre les meilleures formes d’art – la musique, l’écriture, le cinéma, l’histoire elle-même –, de les mélanger et de les momifier; dans mille ans, les gens vont pouvoir ouvrir la voûte et sortir la momie. Ce n’est pas rien! On est maintenant capables, non seulement de diffuser le divertissement, mais aussi de l’encapsuler. C’est énorme! », image le volubile créateur et homme d’affaires.
Visages à surveiller
De 7 – De Broadway à Hollywood se démarqueront certainement des visages parmi les six chanteurs-danseurs minutieusement choisis par Gregory, qui avait côtoyé plusieurs d’entre eux dans des projets précédents.
Il avait enseigné à Audrey-Louise Beauséjour à Star Académie après l’avoir accompagnée à La cour des grands lorsqu’elle était enfant, puis l’a dirigée dans La mélodie du bonheur l’an dernier, tout comme ses autres poulains Marc-Antoine Gauthier et Klara Martel-Laroche (dont la voix vous jettera par terre). Frédérique Mousseau et Mathieu-Philippe Perras ont notamment pris l’expérience de la caméra en participant à La Voix, respectivement aux éditions 8 (2020) et 9 (2023), tandis que Gabrielle Roy-Lemay a parfait son art dans diverses formations et en solo (elle travaille à un premier EP). Quant à la violoniste Marjorie Bourque, Gregory l’avait repérée à l’émission Virtuose, qu’il animait à Radio-Canada.
Ce dernier est tellement convaincu des capacités de ses troupes qu’il se prépare à devoir remplacer ses recrues, si celles-ci sont appelées ailleurs et que l’aventure 7 – De Broadway à Hollywood se poursuit au-delà du calendrier prévu.
« Si on fait bien notre job, ce show-là aura un certain nombre d’années de vie. Et si on fait vraiment bien notre job, il y en a, là-dedans, qui ne seront pas disponibles pour faire des shows à Québec en 2024, parce qu’ils auront pogné des contrats ailleurs, dans un rôle principal de quelque chose. Et c’est exactement l’objectif. C’est le but de l’opération, que tout le monde progresse, avance, et que ça soit un tremplin. »
Le spectacle 7 – De Broadway à Hollywood sera présenté à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, à Montréal du 15 au 19 novembre (placedesarts.com) et à la Salle Albert-Rousseau, à Québec, du 20 au 23 juin 2024 (sallealbertrousseau.com).
Gregory Charles vient aussi de lancer le récit Un homme comme lui, où il raconte la vie de son papa, Lennox Charles, aux Éditions La Presse, dix ans après la parution de N’oublie jamais, un hommage à sa maman.
Marie-Josée R.Roy
Fondatrice / Rédactrice en chef / Journaliste