Elle surgit à point pour l’Halloween, et elle fait beaucoup plus rire que frissonner, cette Famille Addams revue à la sauce québécoise, que le tout show business d’ici a applaudie – parfois dans de sympathiques costumes rappelant l’univers des Addams – en première montréalaise, lundi, à l’Espace St-Denis.
Elle épate et amuse dans une scénographie soignée et de grande qualité. Et ce, ô bonheur suprême, sans trop de longueurs (bien que la deuxième partie soit un tantinet plus répétitive que la première). On irait n’importe quand déguster chez elle un festin fraîchement tué « dans la ferme éducative d’en face », au son des emblématiques accords de la pièce-thème joyeusement macabre.
Le drôle de clan Addams a-t-il encore besoin de présentation? Les personnages créés par le dessinateur américain Charles Addams, qui ont connu diverses vies (de la fiction télé des années 1960 au film de Barry Sonnefeld en 1991, en passant par la mouture chantée et dansée sur Broadway en 2010 – et ailleurs dans le monde ensuite – et, même, l’opus de Netflix si populaire récemment) et différents destins selon les déclinaisons, sont familiers à toutes les générations pour amalgamer humour et horreur… sans grande méchanceté. Seulement, papa et maman, à leur premier rendez-vous galant, sont allés voir Massacre à la tronçonneuse au cinéma…
Ici, sous la main experte du metteur en scène René Simard, notoire amoureux de comédies musicales, huit comédiens, 10 danseurs et sept musiciens (eux « cachés » derrière les fenêtres du manoir Addams) s’exécutent dans des dialogues intelligents et des chorégraphies de multiples styles placées par le très occupé duo Team White (gagnant de Révolution en 2018, qui a notamment collaboré au Gala Artis, Star Académie, Chanteurs masqués, au long métrage des Belles-Sœurs actuellement en production et avec le Cirque du Soleil).
La famille avant tout
C’est la consternation chez les Addams quand l’aînée Mercredi (Alexandra Sicard, qui se débrouille très bien du haut de ses 19 ans) annonce avoir trouvé l’amour en la personne du sage Lucas Beineke (Simon Dufresne)… et se met à rêver de de Walt Disney plutôt que de jouer des mauvais tours! Alors que sa mère, l’exubérante Morticia (Rita Tabbakh, pleinement à son aise), croit à un flirt passager, Mercredi confie plutôt à son père, Gomez (Luc Guérin, imposant en patriarche fier de ses racines « sanglantes ») son intention d’épouser l’élu de son cœur, en tenant l’auteur de ses jours au silence jusqu’à la fin d’un souper organisé pour introduire les Addams aux Beineke. Ceux-ci s’habillant plutôt de beige que de noir, comment se déroulera la présentation officielle? N’ayant jamais caché quoi que ce soit à sa femme, Gomez respectera-t-il le souhait de discrétion de sa progéniture?
Il ne serait pas exagéré de parler de « notre » Famille Addams comme d’un des meilleurs spectacles musicaux montés dans la province dans les dernières années, du calibre de Mary Poppins ou d’Annie, qui cartonnaient respectivement au festival Juste pour rire en 2016 et 2022. La famille Addams supplante également en émotion et en envergure la Mélodie du bonheur à l’affiche à pareille date l’an dernier.
Ce n’est pas une reproduction à bon marché que nous propose Production Morticia (un regroupement de producteurs, incluant notamment Entourage Spectacle, KOSCÈNE et le Théâtre St-Denis, alliés pour supporter la structure financière du projet). On a mis le paquet pour que la fresque soit belle, bonne, drôle. Les décors, majestueux, évoquant tour à tour une forêt maléfique (identifiée comme Central Park) ou le domicile clinquant des Addams et ses longs escaliers, défilent habilement dans un espace qu’on veut rempli à capacité. Il n’y a pas de temps morts, ni de centimètres perdus! Les costumes sont magnifiques et remplis de détails.
Les voix sont justes (même si le répertoire musical de La famille Addams n’est pas si implanté dans la culture populaire), les comédiens sont parfaits de charisme et leur phrasé est impeccable. On craque pour les créatures colorées qui accompagnent nos principaux protagonistes, suggérant le « reste » de la lignée Addams. L’Oncle Fétide (incroyable Tommy Joubert), rigolo, captive à chacune de ses apparitions, volant même jusqu’à la lune! La grand-mère (Claire Jacques)? Elle est délicieusement « malcommode », incarnant bien les principes lugubres comme de droiture des Addams. Et qui ne s’attendrira pas à la vue du minuscule Cousin Machin, aveuglé par sa longue chevelure?
On embarque à pieds joints dans la réalité de cette pimpante troupe décalée, dans son fantasme ultime pour « l’obscurité, la souffrance et la tristesse infinie », pétri de bonnes valeurs familiales et rassembleuses, et diaboliquement intemporelle. L’horreur leur va terriblement bien…
La comédie musicale La famille Addams est présentée à l’Espace St-Denis jusqu’au 4 janvier 2024, puis se déplacera à la Salle Albert-Rousseau de Québec du 12 au 31 décembre 2024. Pour plus d’informations et se procurer des billets, on consulte le site web officiel.
Voyez plus bas des photos du tapis rouge qui précédait la première médiatique.
Marie-Josée R.Roy
Fondatrice / Rédactrice en chef / Journaliste
Fondatrice, rédactrice en chef et journaliste de Sous les projecteurs, je dévore de la culture québécoise depuis l’enfance et n’ai qu’un objectif, la faire rayonner à travers mes articles, et ce, depuis près de 15 ans. Anciennement journaliste chez Allô Vedettes, HuffPost Québec et l’Agence QMI.